Villa urbaine durable / voyage d'étude en Scandinavie

Viikki

 

Une prise en charge globale du développement durable

Le schéma directeur d'Helsinki de 1992 a entériné la densification d'une vaste partie d'une péninsule du golfe de Finlande, selon le principe finlandais d'un urbanisme en « phalanges » où alternent zones bâties clairement définies et ceintures vertes qui les traversent, le long de cinq grands axes de circulation. Une active politique foncière de la ville (propriétaire de 65% des terrains + 16% appartenant à l'Etat) a autorisé une complète maîtrise du développement, à partir de baux emphytéotiques accordés pour 50 à 100 ans. Le suivi des projets, assuré par l'Agence d'Urbanisme a permis d'optimiser la mixité sociale et de favoriser un équilibre logements-emplois dans chacun des quartiers de cette vaste zone. Comme à Tapiola et Ruolathi, mais avec un engagement encore plus fort dans la prise en compte des questions environnementales et des solutions écologiques, une grande attention a été portée au traitement paysager et aux équipements publics.

Viikki, situé à une dizaine de kilomètres du centre d'Helsinki occupe un terrain de 1100 ha à proximité d'une réserve naturelle protégée. Seulement 300 ha seront construits, 800 ha restant couverts de forêts, champs, et espaces verts. La Ville d'Helsinki, l'Université et l'Etat ont étroitement coopéré avec les entreprises privées dans l'aménagement de ce quartier, afin de créer un pôle de recherche et développement dédié aux bio-technologies, aux bio-sciences et à l'agronomie. Le but était d'associer les capacités d'expertise de l'Université au dynamisme innovant des départements « recherche et développement » du secteur privé. Cette coopération maîtrisée avec les industriels apparaît comme une des spécificités de la planification finlandaise.

Aujourd'hui coexistent un parc universitaire et technologique, des quartiers résidentiels et une réserve naturelle. Le quartier est destiné à accueillir 6000 emplois, 6000 étudiants et 13000 habitants. Des coulées vertes alternent avec des ensembles de logements, dont l'exposition au soleil est optimisée; ils constituent avec les équipements, des îlots ouverts, auxquels les bâtiments ont directement accès. La circulation automobile est séparée des voies piétonnes et cyclables.

Une rivière à vocation écologique a été détournée en limite des quartiers-est résidentiels. Paysagistes, horticulteurs, géo et hydro-techniciens se sont associés pour développer des principes écologiques et acheminer l'eau de pluie jusque trois bassins. Ce cours d'eau constitue un élément paysager autour duquel un milieu humide, avec sa faune et sa flore, satisfait des exigences écologiques de purification de l'eau de pluie. De nombreux jardins individuels côtoient des éco-parcs et un vaste centre de jardinage, dont la serre expérimentale est gérée en coopération ville-entreprise privée : Gardenia, avec son jardin d'hiver, son centre d'information environnemental, son centre de formation et ses commerces liés à la nature.

La conception des parcs récréatifs a privilégié une large bio-diversité  et s'est inspirée des paysages cultivés traditionnels et des enclos de ferme ; l'idée générale étant de permettre aux résidents d'entretenir une active relation à la nature. Quant aux équipements et bâtiments publics, ils ont fait l'objet d'une recherche innovante dans les domaines programmatiques, architecturaux et écologiques.

Comme le souligne Ritta Jalkanen chef du projet au département de planification urbaine d'Helsinki, les enjeux affichés à Viikki : protection de la nature, économie des ressources, en particulier énergétiques et réduction des émissions de gaz à effet de serre, sont ceux que le gouvernement s'efforce d'imposer à l'ensemble de la construction finlandaise, au travers d'un programme national écologique et de développement durable, tout en s'appuyant sur les associations environnementales pour motiver les usagers.

C'est dans un esprit à la fois innovant et soucieux de l'environnement que les zones d'activité et résidentielles ont été implantées et que des techniques nouvelles, conformes aux exigences de développement durable, ont été expérimentées. Les divers bâtiments sont reliés à un réseau de haute technologie informatique.

Les premiers bâtiment du Biocentre ont été construits à partir de 1995; le centre d'information du parc scientifique et le premier incubateur d'entreprises ont été terminés en 1999, un troisième bâtiment du Bio Centre et la serre Gardenia en 2001. La construction des premiers quartiers d'habitation démarra en 1997 à Latokartano. Une grande partie du programme est aujourd'hui construite ou en cours de réalisation  ; le projet doit se poursuivre jusqu'en 2010 sur deux autres ilôts : Viikinmaki et Viikinranta

Cette vaste opération se voulait exemplaire des politiques urbaines affichées par la Ville d'Helsinki, en particulier autour de la question de la densité des constructions sur le territoire. Un débat de société fut ouvert à cette occasion, pour trouver des voies satisfaisant à la fois des enjeux d'économie du sol, d'efficacité de la construction et des demandes d'un habitat diversifié répondant à des besoins et modes de vies différents. La réponse apportée à Viikki et les modèles alternatifs de logements proposés, se voulaient démonstratifs d'une plus grande efficacité d'utilisation des espaces autour du principe « not big but grand ».

Dès les premières constructions, les expérimentations écologiques et les principes de construction durable furent encouragées et soutenues. Des aides nationales (Centre de développement écologique TEKES, Ministère de l'Environnement, Ministère de l'Industrie) et municipales (diminution des taxes et charges) soutiennent l'innovation et le développement écologique.

Des concours furent organisés sur ces bases pour les différents lots et pour les nombreux équipements. 13 lots ont été distribués à 8 groupements regroupant promoteurs et architectes. En outre, un quartier expérimental d'immeubles en bois fut programmé et soutenu pas l'industrie du bois.

Pour vérifier l'efficacité des projets présentés et le respect des principes affichés par la Ville, une méthodologie d'analyse de critères a été mise au point autour d'une grille : « Pimwag » qui définit des objectifs à atteindre. Ceux-ci sont classés en trois niveaux dans cinq secteurs d'intervention. C'est le nombre de points obtenus sur l'ensemble de ces secteurs qui conditionne l'obtention du permis de construire, ce qui autorise les équipes à des orientations et des choix écologiques divers. Le nombre maximum de points attribué est de 30 ; un projet qui en obtient 10 peut être qualifié d'excellent du point de vue écologique, plus de 20 points représente un projet particulièrement innovant dans ses principes écologiques. Mais l'accent peut être également mis sur d'autres éléments tels que la qualité des volumes, l'efficacité, les matériaux de façades, les équipements.

Les cinq secteurs permettant l'attribution de points sont les suivants (In «The experimental building area of Viikki, Ritta Jalkanen, Arkkitehti n° 3, 1999, "Helsinki city planning department publication" 1998/6 -Ecological building criteria for Viikki 25 May 1997, et «l'Architecture Ecologique-29 exemples européens », Dominique Gauzin-Muller, Le Moniteur 2001):

  • pollution (CO2, eaux usées, élimination des déchets de construction et domestiques, labels écologiques) :
  • ressources naturelles (utilisation de combustibles fossiles dans l'énergie de chauffage, énergie électrique, flexibilité des habitats et des espaces communs) ;
  • santé (climat intérieur, contrôle de l'humidité, de l'exposition au vent et au soleil, variété des plans de logements) ;
  • bio-diversité (choix des plantes et gestion des eaux de pluie) ;
  • production de l'alimentation (utilisation de compost, eaux de pluies, choix des plantations potagères et sols).

Il est requis un niveau de base pour tous les bâtiments; le dépasser permet l'obtention de points. Les surcoûts ne doivent pas être supérieurs à 5 % et être récupérables sur les coûts de maintenance.

  • Réduire les coûts d'énergie de 34%, en regard d'un projet normal, permet par exemple, d'atteindre le niveau de base avec une consommation de 105 kwh/m². A ce niveau s'ajoute un point supplémentaire, si le projet atteint -47% avec 85 kwh/m² ou -59% avec 65 kwh/m².
  • Même logique pour d'autres critères comme le CO2, où une diminution de l'émission d'au moins 20% en regard d'un logement moyen finlandais est demandée ; obtenir un meilleur score permet l'attribution de points supplémentaires : un pour -33% et deux pour -45%.
  • Pour l'isolation des bruits, adopter la nouvelle normalisation permet d'obtenir un point et passer au delà, deux points.
  • Quant à l'élimination des déchets de construction, le minimum imposé est une baisse de 10% soit 18kg/m² en 50 ans ; un point est obtenu à -25 % avec 15kg/m² en 50 ans et deux points avec 10kg/m² en 50 ans.
  • La diminution des déchets domestiques  doit être au minimum de -20% avec 160 kg/logement/an ; un point est obtenu pour -30% avec 140 kg/logement/an et deux points pour - 40% avec 120 kg/logement/an .

Voulant faire de ce quartier un exemple en matière d'économies d'énergies, et la plus grande expérimentation finlandaise, un soutien particulier a été accordé aux énergies renouvelables, avec une dizaine de systèmes de chauffages solaires indépendants. 400 logements sont dès aujourd'hui concernés ; 1240 m² de surface de capteurs sont intégrés dans les toits, représentant, dans un pays au climat très froid, 1/3 de la chaleur exigée et plus de la moitié de l'énergie nécessaire à l'eau chaude domestique. Mais les bilans encore provisoires en 2003, soulignent que le coût en est encore élevé et ne peut se passer des importantes aides. Ritta Jalkanen (entretien effectué en août 2003, au bureau d'urbanisme de la ville d'Helsinki), urbaniste à la municipalité d'Helsinki qui s'était très impliquée dans la maîtrise environnementale de cette zone, espère en utiliser les résultats pour accroître les exigences écologiques et économiques, lors des opérations d'aménagement urbain futures, en particulier sur le vieux port d'Helsinki à Kruunuvuorenrenta où est prévu un nouveau développement, dont le financement des logements, serait moitié social, moitié privé, mais dont seulement 15% de constructions ne seraient pas contrôlées par l'état.

 

 

 

Le quartier universitaire et scientifique

Le premier bâtiment destiné à la formation permanente en sciences et technologies biologiques, de forme courbe et comprenant trois étages autour d'un vaste hall  fut construit dès 1991 ; mais le véritable parc scientifique ou Biocentre avec son campus, son restaurant et sa bibliothèque furent réalisés en 1996, complétés par le deuxième et le troisième Biocentre en 1999 et 2001. De l'autre côté de l'avenue se trouve l'incubateur d'entreprise.

En 1999, le centre d'information Korona compléta cet ensemble universitaire. ARK-House Architects gagna ce concours sur les bases d'un contrat « design and build » ; le consortium constitué à cet effet s'est également vu confier la maintenance des lieux pour cinq ans. De forme cylindrique, ses façades en double verre isolant thermiquement et phoniquement, changent de couleur selon les heures du jour et sont largement ouvertes sur un espace très paysagé et des jardins intérieurs. Korona, bâtiment expérimental, sur le plan technologique, en particulier dans son efficacité énergétique, constitue l'élément phare et symbolique du quartier scientifique.

Cet ensemble de bâtiment à l'architecture très marquée et à la technologie innovante se veut central de l'activité de Viikki et le fondement significatif de son identité. Le centre d'information environnemental et de jardinage, la serre Gardenia, à l'architecture pyramidale et transparente, est ouvert au public depuis 2001. Proche d'une réserve naturelle il complète ce quartier ; de nombreux habitants d'Helsinki le fréquentent.

 

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Les logements, objet de nombreuses expériences et partenariats: du renouveau de la construction en bois à des expérimentations innovantes et créatives recherchant l'autonomie énergétique

Les logements qui occupent la partie sud de Latokartano, au nord-est du parc scientifique présentent une grande variété architecturale et urbaine. Ce quartier a fait l'objet d'une vaste expérimentation et de plusieurs concours attribués à 8 groupements d'architectes associés à des « developers », dont les projets répondaient aux exigences écologiques et à l'analyse des critères du système Pimwag. Selon l'habitude finlandaise, la conception et réalisation des programmes d'habitation furent confiées principalement au secteur privé, à charge pour ces promoteurs de répondre strictement aux cahiers des charges et impératifs imposés par l'état et la municipalité. Les lots furent partagés entre ces groupements, permettant une certaine mixité entre les constructions privées et sociales : accession à la propriété, logements locatifs et logements dont l'occupation est contrôlée par l'Etat occupent les mêmes îlots. Certains des constructeurs entretiennent des relations avec la municipalité d'Helsinki depuis plusieurs décennies et ont participé aux grandes opérations d'urbanisme. ATT-Company, régie immobilière de la ville d'Helsinki est considérée comme un des « developers » les plus efficaces et les mieux impliqués dans les réalisations sociales. Une coopérative d'habitat (Etela-Suomen YH) a pris en charge un des lots. Les grands constructeurs-developers se partagèrent les autres lots : VVO Developers OY, Skanska South Finland Oy, YIT-Corporation, Helsingin Seudun Asumisoi-keusyhdistys. Un fort encadrement des services municipaux de l'urbanisme, assistés des partenaires chargés de la maîtrise de l'énergie, a permis de veiller à l'application d'un certain nombre de principes considérés comme prioritaires : place des espaces verts et des jardins, nombreux équipements de proximité, choix des matériaux, traitement des eaux grises, récupération des eaux pluviales et de la chaleur, recyclage des déchets, diversité des méthodes de maîtrise de l'énergie, énergie solaire passive et active.

Mais les « developers » visent l'équilibre économique de leurs opérations et qualité et innovation sont directement dépendantes des aides qui leur sont accordées.

L'urbanisme de kiii affiche avec force l'objectif de protéger le paysage naturel et de favoriser des modes de vie peu consommateurs de ressources, tout en misant sur la technologie et en dotant largement les logements et équipements de réseaux informatiques. La partie la plus avancée du programme se situe à Latokartano-sud. Les îlots d'habitation présentent une certaine diversité du point de vue architectural et technologique et se veulent intégrés au site naturel. Les constructions ont pour la plupart plusieurs étages. Mais séparées les unes des autres et disposées en îlots ouverts, elles présentent des échelles différentes et une variété de modes constructifs. Les maisons individuelles sont plutôt réalisées dans le cadre de programmes économiques. De vastes cours se trouvent à l'intérieur de ces îlots et les typologies vont de maisons en bande d'un étage à des immeubles de plusieurs étages qui optimisent les orientations au vent et au soleil.

 

 

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Les immeubles en bois de PUUKERROSTALOT

Un des premiers concours de logements organisé à Viikki en 1996, sous la forme « design and build » s'orienta sur la construction en bois et fut attribué à l'architecte Mauri Maaki Marttunen, connu pour son action de rénovation d'une ville ancienne en bois, Ramau. Le prix du bois 1998, année qualifiée en Finlande de « la nouvelle construction en bois » lui fut décerné pour son projet réalisé en 1997. A Viikki, l'équipe voulait ouvrir la voie à la production à grande échelle d'immeubles collectifs en bois. Un centre d'information de l'industrie du bois était d'ailleurs prévu à proximité de cette réalisation

Ces logements de 3 et 4 étages, situés dans un cadre paysagé près d'un étang, étaient destinés au personnel de l'Université qui s'y installa avec enthousiasme mais en critiqua rapidement les conditions d'isolation phonique et la mauvaise qualité générale des matériaux. Les immeubles dont la structure est en bois reposent sur des fondations en béton ; le cloisonnement intérieur est en plaques de plâtres. Malgré des tentatives pour mieux isoler les logements d'un étage à l'autre, les bruits continuent à être transmis et sont mal supportés par les locataires qui, bien qu'appréciant la localisation, l'architecture et l'organisation intérieure de l'espace, quittent les lieux dès qu'ils le peuvent. La plupart des immeubles ont 3 étages, celui de 4 étages dispose d'un ascenseur bruyant. Un très fort turn-over caractérise cette opération.

Le couple interrogé est particulièrement critique de cette nuisance phonique et s'apprêtait à déménager vers un logement plus éloigné de leur lieu de travail, mais « sans bruit des voisins ». Ils considèrent néanmoins que leur logement de 78m² était fort bien dessiné avec sa petite terrasse en rez-de-chaussée, une cuisine intégrée dans un grand séjour, et une loggia qu'ils avaient reconvertie en chambre d'enfant.

Un architecte interrogé par ailleurs, Hannu Kiskila, confirme la difficulté à réaliser, dans des conditions compétitives des logements collectifs en bois. Il voulait utiliser ce matériau, qu'il apprécie pour ses qualités écologiques, dans son projet « SUNH », mais ne put trouver une solution viable économiquement, l'isolation acoustique nécessitant de mettre en ouvre des planchers coûteux, intégrant de multiples couches isolantes.

 

 

 

Une école normale au milieu des logements dont les couleurs vives marquent le paysage

Une vaste école normale aux matériaux contrastés et aux couleurs franches représentera, quand il sera occupé un point fort d'activité dans cette partie de VIIKKI réservée aujourd'hui au logement à vocation écologique et trop peu animé dans la journée, sauf par les jeux d'enfants..

 

 

 

 

 

Un quartier expérimental à vocation écologique

Construit de 2000 à 2002, la plupart des « developers » y sont intervenus pour y construire des logements en accession, des logements locatifs libres et des logements locatifs à attribution contrôlée. Latokartano-sud a été réalisé dans le cadre du programme Eco-communauté qui s'appuie sur une coopération entre l'association des architectes finlandais, le Ministère de l'environnement et le Centre de développement écologique TEKES. 1700 habitants occupaient ce quartier de 24 ha, à sa livraison. La plupart des logements sont collectifs, de typologie variée et dotés de terrasses mais des maisons individuelles occupent des espaces bordés de jardin. La hauteur des immeubles varie d'un étage et demi à cinq étages. La moitié du programme a été vendu en accession à la propriété, un quart loué et un quart est réservé à une attribution contrôlée. Les coûts de fondation élevés dus à des sols médiocres ont été compensés par une réduction de la taxe foncière pendant 30 ans. Les différentes équipes devaient proposer une construction écologique et des projets, dont la flexibilité et la salubrité permettraient un usage et une protection de l'environnement à long terme : maintien des ressources naturelles, contrôle des émissions de gaz à effet de serre et de la pollution, réduction des déchets. Il était prévu de diminuer de moitié les énergies fossiles, de 40% les émissions dans l'atmosphère, d'un tiers la consommation d'eau ainsi que l'élimination les déchets.

Le projet des Viikki Eco-blocks-Tilanhoitajankaari de Jukka Turtienen et construit par la régie immobilière d'Helsinki a obtenu 10,8 points après évaluation par la grille Pimwag. Il dépend du quartier où l'énergie solaire a été imposée et contrôlée par le Helsinki Energy Board. 370 m² de panneaux solaires ont été installés sur les toits afin de chauffer l'eau. Une armée de girouettes, qui constitue un système de ventilation innovant, anime le paysage en se dessinant dans le ciel. Les immeubles situés le long de l'avenue ont 4 et 5 étages. En face, le long d'une allée se trouvent des maisons en bandes de forme cubique et économique dans leur compacité avec des terrasses en bois. Un centre médical et social est situé au rez-de-chaussée.

La structure en béton des immeubles de logement a été coulée sur place ; les façades légères, dont le cadre est en béton sont remplies de briques noircies sans doute recyclées.

Chaque appartement dispose d'une terrasse en bois ou d'un balcon et d'un sauna. Les pièces d'eau ont un plancher chauffant à partir d'une circulation d'eau chaude en circuit fermé. Chauffage solaire, récupération de la chaleur et ventilation contrôlée, alliés à une bonne orientation et compacité, contribuent à réaliser des économies d'énergie. Les eaux de pluie sont récupérées et stockées dans des bassins, puis pompées afin d'arroser les jardins.

87 logements sont loués par la ville et 38 font l'objet d'une attribution contrôlée. Les logements font 64 et 75 m².

 

 

 

« SUNH » : expérimentation phare du quartier consacré à l'énergie solaire

Cette partie de Latokartano a été le support du projet expérimental européen à visée reproductible (EU Thermie Programme). La plupart des immeubles ont intégré dans leur architecture et fonctionnement technique un système de chauffage solaire devant satisfaire la moitié des besoins en eau chaude et près de 15% du chauffage. « SUNH », résultat d'une recherche architecturale et constructive avancée privilégiant les aspects thermiques et écologiques a fait de ces immeubles, aux caractéristiques bioclimatiques, l'exemple finlandais le plus cité («SUNH » a été, en particulier, cité comme exemplaire des opérations finlandaises in « l'Architecture écologique - 29 exemples européens »).

Le projet a été soutenu, dans le cadre  du programme européen « Thermie Sunh » par « Solar Urban New Housing », qui cherche à promouvoir des solutions innovantes et reproductibles d'économie de l'énergie, une utilisation du solaire et l'emploi de matériaux de construction écologiques. L'ensemble de ces exigences a été satisfaite : chauffage par le sol utilisant l'eau de retour à basse température du chauffage urbain, solaire actif et passif, ventilation mécanique personnalisée avec échangeur selon les saisons, panneaux solaires pour réchauffer l'eau. Ritta Jalkanen, chef du projet « Viikki » pour la ville d'Helsinki, considère, dans l'attente des résultats d'un bilan énergétique, que c'est l'expérience solaire et environnementale la plus aboutie et espère que les investissements seront réutilisables dans les développements urbains futurs de la région.

L'architecte Hannu Kiskila (Arrak Achitects) a fortement investi pour le compte et en collaboration étroite avec la Régie immobilière de la ville d'Helsinki dans la réflexion préalable à l'élaboration de ce projet de 44 logements locatifs municipaux, avec aide personnalisée au logement pour favoriser la mixité. C'est sans doute le projet qui s'est efforcé d'aller le plus loin pour satisfaire les enjeux environnementaux et les critères d'analyse de la grille écologique.

4 000 m² de plancher sont disposés en un bloc de R+3 d'un côté d'une cour aménagée et en deux rangs de maisons en bande R+1, à terrasses et serres, orientées au sud, sur des jardins, de l'autre côté de la cour. Les immeubles collectifs sont organisés en duplex soit d'accès direct de plain-pied, soit par une coursive et disposent de terrasses au dernier étage. La taille moyenne des logements est de 80 m². Des locaux d'utilisation collective et de services referment la cour, dans un plus petit bâtiment. Afin d'économiser l'eau, des saunas collectifs remplacent les saunas individuels. Un soin particulier a été apporté à l'organisation des espaces collectifs devant favoriser les rencontres et relations. Ce projet, dont plusieurs des conditions d'utilisation et de maintenance par les locataires étaient nouvelles, a fait l'objet d'un monitorat pendant deux ans permettant ainsi une optimisation de l'usage et des consommations.

Les choix constructifs favorisent une flexibilité des logements, facilement transformables et renforcent le confort thermique : vide sanitaire, cadre à intérieur en béton pour favoriser un effet de masse et l'inertie, isolation renforcée, double vitrage à basse émissivité avec une lame d'air et serres. Le prélèvement de l'air de la ventilation est inversé selon les saisons, par les services d'entretien : récupéré au nord en été et il l'est au sud en hiver, où il est réchauffé dans les serres. La structure est porteuse, les planchers en dalle de béton alvéolées ne nécessitant pas d'isolation acoustique. L'ossature et les éléments de façades en bois, sont préfabriqués et fortement isolées. C'est d'ailleurs une des caractéristiques du principe constructif que d'avoir largement fait appel à la préfabrication qui, en Finlande permet une meilleure qualité de finition et de performances énergétiques ainsi qu'une réduction des déchets de chantier. Les toitures sont également à ossature bois avec une efficace isolation en cellulose injectée entre les poutres en bois de la structure. Les nombreux balcons sont en bois, tout comme les coursives, dont une réglementation récente en Finlande, autorise l'utilisation. L'acier est également largement employé : couverture, garde-cors, escaliers et rampes.

L'architecte Hannu Kiiskila (entretien effectué en août 2003, avec Hannu Kiiskila dans les bureaux d'Arrak Architecture à Helsinki) souligne que travailler avec certains « developers » est tout à fait bénéfique pour le projet et qu'il apprécia les apports de ATT-Company combinant une bonne organisation du process et des capacités d'innovation à une réelle implication sociale. Néanmoins l'expérimentation n'est possible pour ces acteurs que dans le cadre de limites économiques et nécessite des aides et subventions complémentaires qui ont pu être réunies pour son projet. Il ajoute que c'est du rôle de l'architecte de proposer des idées innovantes aux constructeurs-maîtres d'ouvrage et de sa responsabilité de les rendre exécutables. Mais il constate que le coût en est très élevé pour la maîtrise d'ouvre, qui fait là  ouvre sociale.

Son projet n'a pu être finalisé, sur un terrain pourtant municipal, que grâce aux nombreuses aides nationales et européennes. Pour les 44 logements, le prix de revient du m² est de 1614€, dont 10% aidés (90 € par l'Europe et 60€ par le TEKES). Programmant des grands espaces, il a cherché à s'opposer à la tendance générale à diminuer les logements pour les rendre accessibles financièrement. Il s'est impliqué dans une formation des locataires et dans un programme gouvernemental d'analyse des résultats.

Ces logements sont attribués sous condition de revenus, mais de fait, sont appropriés par les classes moyennes. Le loyer est autour de 7€ le m² + charges. C'est sur ces dernières que les efforts ont porté, afin de les réduire au maximum (par exemple - 60% pour l'eau chaude). En ce qui concerne les panneaux solaires, l'architecte considère que les coûts auraient pu être diminués d'un tiers, si les collecteurs solaires et les batteries n'avaient pas été sur-dimensionnés, par manque d'expérience et crainte d'une insuffisante efficacité. Il s'interroge également sur le retour d'investissement de ces collecteurs, juste amortis après 20 ans au moment où ils doivent être renouvelés et préconise des pompes à chaleur avec chauffage par le sol, dont le coût d'installation de 8500€ est amorti après 7 ans et qui ne nécessitent pas de compléments de chauffage l'hiver, par une autre source.

En ce qui concerne les matériaux, Hannu Kiiskila regrette de n'avoir pu davantage employer le bois, qui entraîne, dans la construction collective, des surcoûts d'isolation phonique des planchers. Cherchant professionnellement à le promouvoir, il s'est néanmoins efforcé de l'utiliser le plus possible. Les façades porteuses, préfabriquées, sont constituées, à l'extérieur d'un complexe stratifié à base de papier recyclé et de résine colorée, à l'intérieur de plaques de plâtre, une ventilation permettant à l'air de circuler dans la structure. Le sol est recouvert de dalles de bois lamifié, posées sur des dalles en béton alvéolaires et recouvert d'une étanchéité bituminée.

Les contrôles de l'ingénierie ont d'ailleurs signalé une trop forte isolation des lieux, en particulier pendant l'été 2003 et des difficultés pour inverser la circulation d'air des serres vers le nord.

Les résultats de cette opération qui concentre des innovations en de multiples domaines sont très attendus, mais il semble que les perspectives d'économie énergétique et de consommation d'eau (40 à 50%) aient été  un peu optimistes, d'autant que la maintenance de telles technologies est également expérimentale et pas encore très maîtrisée.

Mais ce projet a fait la preuve qu'il était possible de répondre au mieux et de façon originale aux exigences environnementales de la grille d'évaluation imposée par la collectivité locale. C'est grâce à la réflexion amont conduite par la maîtrise d'ouvre et à la collaboration étroite avec une maîtrise d'ouvrage responsabilisée et sachant mobiliser des aides internationales et nationales qu'un tel projet a pu être réalisé.

 

 

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Quelques autres projets soutenus par «EU Thermie Programme»

Autour de « SUNH » d'autres projets ont attiré notre attention, certains achevés et habités, d'autres encore en cours de construction :

  • AS.OY HELSINGIN KELTAVUOKKO, construit par SKANSKA, a obtenu 9,5 éco-points. Deux blocs de 63 appartements, en accession, se développent sur 5 et 6 étages. Des panneaux solaires sont installés sur les toits pour réchauffer l'eau. Des balcons de couleur jaunes, situés sur les façades-sud, agissent comme écran protecteur et accumulateur solaire. Les chambres sont au nord où la température est plus facile à réguler. L'espace et la flexibilité d'usage ont été privilégiés. Chaque appartement dispose d'un sauna et d'un espace de stockage à l'étage. L'eau de pluie est collectée dans un bassin pour l'arrosage des jardins dont plusieurs sont privatifs. Au pied des immeubles, des espaces de jeux animent les lieux.
  • YIT,TILANHOITAJANKAARI est la partie individuelle d'un programme comprenant également des blocks de logements collectifs privés et dont l'attribution n'est pas contrôlée.

Des maisons en bois avec serres et jardins extérieurs offrent près de la construction « SUNH » dont l'esthétique est très technologique, une alternative architecturale plus écologique. Si l'économie d'énergie et de ressources sont également recherchées, le promoteur a davantage mis l'accent sur un aspect formel traditionnel et un mode de vie individuel, plus compatibles à la demande d'une cible de clientèle voulant accéder à la propriété. Le « developer » YIT a cherché ici, à réaliser un programme pilote afin de développer et commercialiser, un nouveau concept et design, centré sur la santé, la durabilité et le développement durable.

 

 

Des logements en cours de construction

Derrière ces opérations, le quartier continue à se construire sur les mêmes bases d'économie d'énergie et de ressources. Ce sont toujours les mêmes « developers » qui interviennent. Vont-ils intégrer dans ces projets les résultats énergétiques et environnementaux des premières constructions ? La question reste encore posée, mais il semble, du moins pour ce que nous avons pu en voir, que l'architecture se banalise, que les prestations sont moins généreuses, en particulier du point de vue des surfaces et de l'organisation des espaces extérieurs et annexe aux logements.