DES SOLUTIONS ALTERNATIVES AU BPE ?
Comment rivaliser avec le béton prêt à l'emploi sur les chantiers de taille moyenne? Malgré tous les avantages des centrales de chantier, il n'existe pas sur le marché actuel de matériel performant qui puisse concurrencer le coût du béton prêt à l'emploi. Le BPE est un produit industriel qui n'a pas de prix de catalogue et dont les variations de coûts sont très liées à la demande, créant ainsi dans certaines régions un déséquilibre concurrentiel. Pour faire face à cette situation, l'entreprise QUILLE a été amenée à concevoir une centrale mobile, CENTAURE, dédiée aux chantiers de périphérie urbaine. Ses caractéristiques principales sont un automate qui permet la mémorisation de douze compositions; la prise en compte de l'humidité des agrégats; la gestion des consommations de matières (pesées instantanées des produits consommés et cumul pour la gestion des stocks) et la commande automatique. La centrale est pilotée par le chef de chantier avec pour objectif l'approvisionnement en "juste à temps", en fonction de l'avancement du chantier. Le transport sur le site se fait en un seul convoi aux dimensions normalisées d'un ensemble articulé (gabarit routier normal ou exceptionnel de 1ère catégorie). L'installation nécessite juste une préparation superficielle du terrain, sans moyen de levage, en une journée et de plain-pied. Enfin, son débit répond à des chantiers d'environ quatre à six mois de gros uvre, nécessitant la fabrication de 300 à 400m3 de béton par mois.
Une première expérimentation
En 1993, une REX était lancée à Beuzeville; son objectif était de tester les potentiels techniques et économiques d'une première génération de centrales: CENTAURE I.
D'après le CETE de Normandie, "l'analyse du cahier de chantier a permis de montrer des problèmes liés à la conception et à l'utilisation. Dans le cas du chantier de Beuzeville, la rentabilité économique a été atteinte mais il ne semble pas que cela puisse être le cas pour toutes les opérations. Sachant que le prix de revient est l'élément déterminant dans le choix du système de fabrication du béton, il est clair que le BPE, malgré les avantages de CENTAURE, sera plus compétitif".
Une seconde évaluation du CSTB, concernant la qualité du béton, précisait que "le suivi a surtout consisté à une gestion "comptable" des consommations de matière et une vérification en continu de la plasticité du béton et, d'autre part, aux contrôles de la résistance en compression sur cylindres à sept et vingt-huit jours par envoi en laboratoire extérieur au chantier. Cela n'est pas suffisant pour soutenir la comparaison avec la fourniture du béton par centrale BPE dont le laboratoire peut utiliser l'ensemble des contrôles réalisés sur le béton livré pour son système qualité".
Centaure II et ECO 2
L'expérimentation de Gisors CENTAURE II a donc porté sur l'amélioration des performances de CENTAURE I, notamment sur la fiabilité des automatismes et l'extension du champ de programmation de la centrale. Dans le même temps, l'équipe a expérimenté ECO 2, un béton fluidifié qui permet d'obtenir la maniabilité désirée sans ajout d'eau et auquel on incorpore des cendres volantes afin de parvenir à des parements corrects sans ragréage. La formulation de départ était de 60kg/m3 de cendres volantes, 290kg/m3 de ciment, 640kg/m3 de sable sec, une tonne de gravillons et un fluidifiant, " Vitamine Béton ".
Un premier bilan
Le gros-oeuvre des bâtiments de la première tranche est actuellement terminé. Un certain nombre de problèmes techniques demeurent, notamment sur la sonde hygrométrique. Néanmoins, la centrale est rodée et les conditions de fonctionnement normal semblent atteintes. Pourtant, la superposition des deux expérimentations pose des problèmes à l'équipe.
Le béton ECO 2 présente un mauvais aspect, avec un bullage irrégulier dont on n'arrive pas à déterminer la cause. Le passage d'essais en laboratoire directement sur le chantier, sans interprétation précise des différents résultats, semble avoir remis en cause la mise au point de la formulation.
Le chantier, lui, n'attend pas. Il doit répondre à des impératifs de délais et ne peut s'encombrer de trop d'aléas liés à une expérimentation. C'est en ce sens qu'une méthodologie très précise devait être définie dès l'amont.
La dernière évaluation du CSTB précise que "malgré des résultats en laboratoire attestant d'une certaine amélioration, les mêmes problèmes demeurent: bullage important, teinte irrégulière, traces de ressuage en parement. Une légère amélioration a été obtenue en diminuant le nombre de gâchées (de 800L à 700L). Le résultat empirique pourrait confirmer l'hypothèse d'un malaxage imparfait. Devant ces résultats peu satisfaisants, l'équipe de chantier a décidé de ne pas continuer avec le béton ECO2 pour la deuxième tranche.
Quant à CENTAURE II, il s'avère que pendant les deux semaines qui ont suivi le déplacement de la centrale entre les deux tranches du programme, le journal de chantier révèle de nombreux problèmes, soit mécaniques (rayon raclant, casque d'une trémie), soit liés à la commande (liaison avec le PC, étanchéité des coffrets de commande)".
Un bilan actuellement mitigé, mais qui nest pas définitif.