SÉQUENTIEL ET LOGISTIQUE EN OSSATURE ACIER-BÉTON
Comment lorganisation permet-elle doptimiser la productivité et la qualité?
C'est à cette question qu'a tentée de répondre l'expérimentation de Gières. Question difficile à résoudre, non seulement parce que le système constructif (ossature acier/béton associée à des produits industriels) nécessite une organisation du chantier très poussée mais aussi parce que le système d'acteurs n'y est pas habitué. Un double défi donc, organisationnel et technologique, auquel se greffe un troisième objectif, économique. Si pour ce dernier, le caractère expérimental de l'opération peut en occulter certains aspects, il permet tout au moins d'en éclairer d'autres, en particulier ceux liés aux délais et aux approvisionnements. Le terme de réalisation expérimentale prend ici toute sa valeur tant les dimensions techniques, de métiers, organisationnelles et d'économie sont convoquées avec tous les aléas et les incertitudes qui leur sont liées.
Une préparation de chantier concertée
Le constat des opérations précédentes avait permis d'identifier un gisement de productivité et de qualité dans une meilleure organisation de chantier. Ainsi, l'entreprise pilote a défini le projet autour de deux axes: le processus séquentiel et la logistique.
Le chantier a été divisé en cinq séquences et validé par un cahier des charges explicitant la méthode et les moyens logistiques. La préparation de chantier s'est faite sur la base de quatre réunions étalées sur une période d'un mois et demi. Les corps d'état secondaires, qui avaient été désignés dès le départ (groupement TCE avec entreprise-pilote), ont pu ainsi participer à l'ensemble des réunions. Dès ce stade, un certain nombre de solutions ont été validées: les plannings d'approvisionnement pour les CES, les principes d'exécution, la gestion des interfaces et une installation de chantier en fonction de chaque séquence. Un accent fort a été mis sur l'expression des besoins des CES envers le pilote.
Un chantier et une logistique évolutifs
L'installation de chantier a été évolutive. Elle n'a pas collé à une seule vision " gros-oeuvre " mais s'est adaptée aux exigences des entreprises sous-traitantes. Ainsi, la grue a été remplacée plus tôt que prévue par un maniscope qui répondait mieux aux exigences des CES. De même, la recette initialement prévue a vite laissé place à un approvisionnement par façade ouverte. En matière d'organisation logistique, la séquence façade et partitions a été tout à fait significative: l'approvisionnement des produits plâtres s'est fait par palettes chargées à linverse de la pose en sectionnant les approvisionnements en trois parties. Elles ont été mises en place, niveau par niveau, sur des zones marquées à cet effet, permettant au plaquiste de stocker mais aussi de monter ses plaques en fonction de ces repères très précis. Le chantier s'est ainsi avéré être particulièrement propre, tant au niveau intérieur qu'au niveau extérieur où les remblais ont été exécutés rapidement. La séquence cloisons doublage a disposé au sol d'une aire de stockage intermédiaire spécifique permettant le conditionnement des palettes logement par logement. Le déroulement de la séquence partition s'est ensuite réalisé sur les plateaux, conformément aux attentes, sans qu'aucun aléa vienne la perturber. Le partenariat initié avec l'industriel (Plâtres-Lafarge1 ) a permis à l'entreprise Sud-Est Plâtres (plaquiste) de commander des produits à des longueurs non-standards, découpés au centimètre près.
Enfin, la construction s'est faite à un rythme soutenu puisque le chantier a été réalisé en neuf mois, avec un mois d'arrêt consécutif à des problèmes administratifs.
Une conduite de travaux élargie
Dans ce type d'organisation, l'entreprise pilote s'engage à mettre à disposition des sous-traitants la logistique prévue, mais aussi à ajuster les études du bureau de méthodes aux réalités du chantier et équilibrer en permanence les rythmes de ses partenaires. Elle joue donc un rôle central qui est assuré par le conducteur de travaux qui exerce une fonction logistique élargie au service des corps d'état secondaires.
Bilan
L'opération de La Rochelle avait permis de démontrer l'efficacité de la filière sèche associée à une organisation logistique appropriée. Gières est allée plus loin. "Il s'est développé un concept logistique adapté à chaque séquence. Il s'est avéré qu'il y avait une part de "logistique verticale" et une part de "logistique horizontale" par plateau, et des logistiques propres à chaque séquence. A cet égard le découpage séquentiel apparaît bien, pour autant qu'il soit pragmatique, comme un très bon support favorisant la réflexion logistique en clarifiant l'organisation suivant un regroupement des tâches tout à fait pertinent" commente Patrick Martin (suiveur-évaluateur de la REX).
Enfin, la satisfaction des ouvriers à travailler sur un chantier propre est un des grands points positifs de la REX.
D'après P. Martin, "lorsqu'il y a, comme à Gières, progrès technologique, social et organisationnel, on tient les trois éléments qui font vraiment progresser l'ensemble de la filière".