UNE PRÉPARATION DE CHANTIER OUTILLÉE ET CONTRACTUALISÉE
Cest sous limpulsion dun partenariat réunissant des PME (Pilet, Robin, Roger), un cabinet-conseil en qualité (Bi-Qualité) et une structure éducative professionnalisée (Probat+TS Livet) que sest construite lexpérimentation de la Roche-sur-Yon (38 logements PLA). Lobjectif des partenaires est doptimiser la préparation de chantier et la planification des travaux en recueillant les besoins logistiques des différents lots dès lappel doffre. " Lidée fondatrice de la démarche est de valoriser la performance globale de lentreprise au travers de coopérations inter-acteurs contractualisées ", souligne Jamil Maleyran, évaluateur de la démarche. Traduction opérationnelle : un additif logistique joint à lappel doffre permet dans un premier temps de déterminer la capacité des entreprises à exprimer leurs besoins et leurs propositions. Seconde phase : synthétiser les demandes des entreprises et y répondre par des outils opérationnels.
Une préparation de lexpérimentation déterminante
Une importante collecte préalable dinformations auprès du maître douvrage, du maître d'uvre et des trois entreprises " pilote " a précédé la conception des fiches logistiques jointes à lappel doffre. Ces dernières se présentent sous forme de questions directives élaborées à partir des thèmes issus de la collecte dinformations initiale : préparation de chantier, coordination et réalisation des travaux, installations de chantier, moyens et modes de manutention envisagés, conditionnement des matériaux, etc.
Un point important : la remise des propositions se scinde en deux enveloppes distinctes. La première se rapporte au prix, la seconde aux fiches logistiques. Afin de préserver un esprit de mieux disance, aucune proposition de prix, aussi basse soit-elle, nest acceptée sans la seconde enveloppe " logistique ". Sitôt louverture des plis effectuée, les étudiants ont procédé à une analyse des fiches. Outre des propositions de modifications au CCTP quant aux produits et matériaux, les remarques des entreprises recoupent pour lessentiel celles exprimées par les acteurs-pilotes : délai suffisant de préparation de chantier (un mois), choix définitif des matériaux en amont, clarté dans les interfaces entre lots, mises au point techniques inter-partenaires et documents à fournir, réceptions intermédiaires des sous-ouvrages et planification. Un plan dinstallation de chantier évolutif est par ailleurs souhaité, ainsi que la mise à disposition de la grue du gros uvre pour les manutentions. Cependant, les entreprises nont pas proposé grand chose en matière de moyens de levage, ni dans celui des colisages, se conformant plutôt à " lhabitude " qui consiste à approvisionner manuellement.
Un système efficace pour gérer linformation
Cest en effet ce qui ressort des outils de logistique " administrative " (circulation des informations, transmission des plans, préparation de chantier, coordination des travaux) expérimentés sur lopération. En premier lieu, un planning privilégiant lenchaînement des interventions et présentant les étapes-clés : fourniture des documents et plans, choix des matériaux, de choix des couleurs, réceptions. Selon Jamil Maleyran, " en intégrant les dates-clés de lorganisation, le planning oblige les entreprises à plus de rigueur en phase de préparation par intégration des délais dapprovisionnement et de fabrication des entreprises. Il contraint aussi la maîtrise douvrage et la maîtrise d'uvre à prendre en compte les délais de livraison ou détudes des entreprises. La notion de tâche évolue ici vers un concept dactivité associant tâches et étapes ".
Autre point : chaque entreprise répertorie lensemble des documents (plans, détails, etc) que les autres acteurs doivent lui fournir pour préparer ses travaux. Elle élabore ensuite ses propres plans datelier et de chantier qui sont contrôlés, validés ou retournés pour déventuelles modifications (architecte ou bureau de contrôle pour examen, entreprise pour approbation...) puis, définitivement approuvés. Le cheminement délaboration des plans est ainsi clarifié, les délais nécessaires à leur exécution sont pris en compte. En corollaire, un calendrier de fourniture des documents, tenu à jour par le maître d'uvre, permet de contrôler les délais et, de ce fait, limplication de tous les corps détat dans la préparation des travaux. Troisième outil : un calendrier de choix des matériaux qui fixe des dates butoirs et permet aux entreprises de proposer éventuellement des références différentes de celles préconisées dans le CCTP. Un autre calendrier permet de planifier toutes les réceptions intermédiaires sous légide du maître d'uvre. Un échéancier, destiné à opérer le choix des coloris au fur et à mesure de lavancement du chantier, complète lensemble de ce dispositif qui inclut des pénalités pour tous les acteurs (y compris pour la maîtrise douvrage et la maîtrise d'uvre) en cas de non-respect des délais. Hormis pour un lot qui a fourni ses plans hors-délai, aucun retard na été observé.
En revanche, le constat savère moins bon en ce qui concerne la logistique matérielle (moyens de levage, aires de stockage, colisage...). Plus particulièrement, une étude portant sur lutilisation dun moyen de levage mécanisé na pas connu de suite opérationnelle. De même, la grue du gros uvre na su se rendre disponible pour les corps détat. Si des contraintes techniques ou financières ont été mises en avant, Jamil Maleyran pense plutôt que " les entreprises ne se sont pas impliquées, les mesures ne concernant quun nombre limité dentre elles. A travers ce projet, les acteurs souhaitaient introduire des exigences réciproques sur le chantier. La logistique documentaire intègre lensemble des opérateurs et se révèle donc très adaptée aux ambitions de lexpérimentation. En revanche, la logistique matérielle est plutôt intrinsèque aux entreprises; sa mise en uvre séloigne donc des objectifs initiaux ".
Comment reproduire la démarche?
Bien évidemment dabord par la volonté de la maîtrise douvrage dimposer la démarche. Les fiches logistiques devront par ailleurs salléger en phase pré-opérationnelle de manière à ne pas trop " charger " les entreprises lors de la consultation. Cest probablement en phase de préparation de chantier quil sagira de reporter certaines questions posées plus en amont sur cette expérimentation. Une intégration plus grande des outils expérimentés, dans le planning détaillé de réalisation, peut également être envisagée afin de simplifier les procédures. Même si le volet logistique " matérielle ", et plus particulièrement les manutentions, na pas été traité sur cette opération, Jamil Maleyran estime que " la formalisation dune démarche structurée autour de la logistique administrative a conduit à une optimisation de la production sur le chantier. On peut donc en déduire que cest la logistique administrative qui assure la performance globale du chantier alors que la logistique matérielle est liée aux performances intrinsèques de chaque entreprise ". Malgré les prix " tirés ", toutes les entreprises (sauf une) ont dégagé un bilan économique positif. Dont acte pour la démarche.