BÉTON INJECTE PAR LE BAS DES BANCHES

Avec la banche hydraulique BH 3000, et la banche B 96 que nous vous présenterons dans un prochain numéro, la Banche Sécurité Béton Injecté (BSBI) constitue la troisième des expérimentations du programme Chantier 2000 destinées à l’amélioration des outils de coffrage. Testée à Mauguio (Hérault) sur un immeuble de vingt-sept logements, cette banche entend répondre à une problématique connue : améliorer la sécurité et les conditions de travail du coffreur tout en augmentant la qualité de réalisation. Réponse apparemment simple : remplir la banche par la partie inférieure du coffrage à l’aide d’un béton directement pompé d’un camion malaxeur.

Principe

Le béton est introduit en pied de banche grâce à une pompe à injection équipée d’une vanne à couteau. Des canalisations métalliques de 100 mm de diamètre acheminent le béton en sortie de pompe. Après aiguillage, des canalisations souples assurent le raccordement avec les buses d’injection dans les banches. Le béton, très fluide, monte alors dans la banche sans emprisonner l’air et confère ainsi aux murs des parements de très bonne qualité. Le système présente potentiellement d’autres avantages, tels la mise en œuvre rapide et réduite à deux compagnons ou la libération de la grue de l’opération de coulage qui permet de la réaffecter à d’autres tâches. Des essais pré-opérationnels ont porté sur l’équipement des coffrages métalliques (Outinord) : pipes d’injection fixées directement sur la banche ou les abouts, accessoires destinés à l’étanchéité et à la reprise des poussées ou tiges hautes accessibles, manœuvrables depuis le plancher par des clés à pipe. Un point important : l’étanchéité du coffrage découle une parfaite préparation des talonnettes de calage et de l’adjonction de joints mousses périphériques.

L‘efficacité du système est tributaire de la qualité du béton. J.P Carrio (P3G Ingénierie), évaluateur de la démarche, souligne que " le béton, proche en résistance d’un B 25 standard, doit être suffisamment fluide pour présenter un comportement proche de celui d’un liquide lors de la mise en œuvre. Le procédé nécessite plusieurs opérations avant l’injection : contrôle du slump (entre 12 et 14 ) à l’arrivée du béton, adjonction d’un fluidifiant, malaxage, puis nouveau contrôle. Il faut donc assurer une parfaite coordination entre l’arrivée du béton sur le site et le cycle de coffrage, ce qui suppose une fiabilisation du processus de commande ".

Le nettoyage du réseau de canalisations conditionne le bon fonctionnement du système. Il s’effectue en refoulant le béton contenu dans les tuyaux vers la zone de coulage, grâce à une boule en caoutchouc spongieux, projetée par de l’air sous pression. A noter - c’est une limite du système - que la mise en place d’un cadre de porte-fenêtre oblige à couler le refend en deux étapes ou à alimenter simultanément la banche par les deux extrémités.

Dernier point : le chef de chantier (Méridionale de travaux) et deux pompistes ont suivi un programme de formation destiné à se familiariser avec tous les aspects liés à l’utilisation de la pompe et à la mise en place des tuyaux. D’autres formations, portant sur le coffrage, sur le béton ou de type " méthode ", ont également été mises en place. Elles ont permis d’établir deux check-listes de décomposition du travail en tâches élémentaires. Des fiches d’évaluation de durée et de qualité sont venues s’y adjoindre.

Vers une plus grande sécurité

Conformément aux objectifs de départ, la BSBI a démontré plusieurs améliorations en matière de sécurité. Ainsi, la manipulation de la benne à béton, jugée très pénible (inertie de deux à trois tonnes), est supprimée. De même, en phase d’injection la montée sur les passerelles est circonscrite à un seul compagnon pour déterminer l’arrêt de remplissage de l’arase supérieure. Relié par radio au pompiste, il ordonne l’arrêt du remplissage de la banche au moment voulu.

Sur ce point, J.P Carrio note que " le principe d’injection permet de ramener la hauteur de passerelle à mi-banche, tout en assurant un suivi du remplissage en toute sécurité. Une étude complémentaire pourrait amener à la suppression des protections hautes ". Tentative avortée sur cette opération : le calage au fil à plomb de la banche et les crochets d’élingue imposent encore de travailler en partie haute du coffrage.

L’utilisation de ce coffrage se traduit aussi par d’autres améliorations : la suppression presque totale des coulures de béton, la conception du matériel qui évite au serrage les coups de marteau. Enfin, la phase de vibration, génératrice de nuisances sonores, ne s’applique qu’au réglage du niveau d’arase et est donc très brève; elle est assurée par des vibreurs extérieurs placés en tête de banches qui suppriment l’aiguille vibrante.

Un procédé utilisable sur tout type d’opération?

Le procédé a été testé sur une toute petite opération devant s’insérer dans le contexte et le style urbain d’une petite ville, et présentant une certaine complexité architecturale. L’opération était-elle mal adaptée pour expérimenter le procédé? C’est en tout cas l’opinion de l’évaluateur qui estime que les choix techniques n’ont pas permis d’utiliser suffisamment la banche pour porter un jugement économique fiable. Il souligne cependant que si la phase d’injection elle-même est très rapide, il convient d’y imputer les tâches hors-coffrage (branche des buses de raccordement, mise en place des tuyauteries, temps d’essais et de malaxage du béton). De même la banche devait permettre de modifier l’organisation du chantier en libérant la grue du coulage, mais le procédé n’a pu être utilisé sur la totalité de l’opération : ce potentiel n’a donc pu être validé. Des améliorations techniques restent à apporter; elles sont liées au nettoyage des circuits de distribution, au fonctionnement bruyant de la pompe, ou à la mise en place des talonnettes et des joints périphériques dont dépend l’étanchéité du coffrage. La très bonne qualité des parements est, quant à elle, incontestable malgré quelques bullages consécutifs à la qualité des bétons (très variable) et aux reprises de coulage; c’est, avec la sécurité et l’amélioration des conditions de travail un des acquis de l’expérimentation.