LE RÔLE DE LA COORDINATION SPS DANS LES QUATRE PHASES DU PROJET

Comment et à quelles conditions la coordination Sécurité Protection de la Santé agit sur les quatre phases d'un projet que sont la conception, la consultation des entreprises, la préparation du chantier et le chantier? A partir de l'exemple de la REX de Poitiers (50 logements collectifs PLA), le présent article synthétise les réflexions de l'atelier " Qualité, Sécurité, Conditions de travail " et celles de Bruno Céolin, évaluateur de la REX de Poitiers , sur ce sujet.

Conception

L'atelier le souligne, " le contenu du PGC résulte de l'analyse, par le coordonnateur, des choix du concepteur, et de l'organisation future de la production ". Autrement dit, au travers du PGCS, la coordination SPS explore toutes les composantes de l'organisation générale du chantier, y compris celles résultant des choix de l'architecte. Les REX montrent que si les coopérations concepteur-coordonnateur ne sont toujours évidentes, elles peuvent néanmoins être fructueuses. A Poitiers, " l'intervention du coordonnateur en phase de conception et d'appel d'offres lui a permis d'organiser les communications et les échanges au sein de l'équipe de maîtrise d'ouvre, avec les services extérieurs, puis avec les entreprises pour obtenir une adaptation au site et des conditions de production et d'entretien optimales ". Traduction concrète : déplacement d'un transformateur EDF, ouverture d'une porte au niveau d'un pallier pour accéder directement à une terrasse ou installation d'une ligne de vie définitive, par exemple. Deux conditions à satisfaire. Un : le coordonnateur doit pouvoir intervenir le plus en amont possible (dès l'esquisse) afin de procéder, le cas échéant, à des modifications importantes; cela induit qu'il détient une forte compétence en matière d'organisation de la production. Deux : l'adhésion de l'architecte qui peut, en accord avec le maître d'ouvrage, apporter des modifications à son projet afin de mieux répondre aux contraintes du chantier.

Consultation des entreprises et préparation du chantier

Afin d'établir leur offre, qui inclue la sécurité, les entreprises prennent appui sur le PGCS qui liste les mesures de sécurité à adopter lot par lot, mesures qui sont retranscrites dans le CCTP. Lorsque la mission de l'architecte comprend les études d'exécution, le coordonnateur pourra quantifier les mesures à prendre qui seront alors intégrées dans le devis quantitatif. Cependant, l'atelier précise que " la clarté et la précision du dossier de consultation sur cette question ne sont pas systématiques. Deux raisons à cela : la nouveauté de la réglementation, et la réticence de la MO et de la MOE qui craignent, non sans raison, une augmentation des prix et qui préfèrent s'en tenir au compte prorata ". Un autre point : si les REX n'ont pas permis de répondre de manière satisfaisante à la question du chiffrage des mesures de sécurité communautaires et coordonnées par les entreprises, l'analyse des textes réglementaires par l'atelier milite pour l'existence d'une ligne sécurité obligatoire dans le DQE. En tout état de cause, " la mission SPS implique que les entreprises signent leur contrat en toute connaissance de cause, tant sur la totalité du produit que sur les parties communautaires et coordonnées SPS de la production. Cela suppose une discussion précise autour des questions d'organisation du chantier, dans la mesure où celles-ci vont conditionner les mesures à prendre et les coûts qui s'y rattachent ". A Poitiers, cette phase préparatoire a porté sur la validation de l'organisation générale du chantier, les choix principaux des installations provisoires, l'élaboration du planning. Et bien évidemment sur l'analyse des mesures SPS telles le maintien de garde-corps provisoires en terrasse durant toute l'opération, les installations électriques et l'organisation des approvisionnements. C'est en prenant appui sur cette phase préparatoire que la phase suivante, celle de la préparation de chantier proprement dite, permettra, avec le coordonnateur, de déterminer plus précisément les modes opératoires et les dispositifs à adopter en matière de sécurité.

Le chantier

L'atelier le pointe, plusieurs opérations " révèlent une difficulté culturelle des acteurs à se doter - mais plus encore à appliquer - des moyens de maîtrise et d'organisation. L'organisation du travail passe par une démarche et des outils qui sollicitent tous les acteurs, depuis le maître d'ouvrage jusqu'au sous-traitant. Cette organisation doit s'appuyer sur des procédures débattues, validées aux moments adéquats. Elle suppose une bonne circulation de l'information et l'établissement de modalités pour ajuster en cas de dérapages; elle doit également impliquer fortement les compagnons par une préparation du travail. Le danger actuel de la coordination SPS est de faire l'impasse sur cette question du rôle et des outils pour que les compagnons participent à la gestion et la variabilité du chantier ".

" L'affaire des balcons " sur la REX de Poitiers illustre cette problématique : les plans de principe des balcons béton joints au DCE ont conduit à des impossibilités de construction. D'où d'interminables tractations entre l'architecte et l'entreprise sur leur profil. Tenue par les délais et l'avancement des équipes GO, l'entreprise en a préfabriqué et posé une première série sans détails d'exécution validés, puis a modifié ceux-ci à la demande de l'architecte. La solution acceptée est différente des plans-marché et la modification n'a pas été répercutée sur le lot serrurerie, d'où un surcoût lors de la pose des garde-corps (nécessité de chevilles plus performantes). Sur ces problèmes de conception technique, se greffent alors des problèmes organisationnels, les modes opératoires définis lors de la phase préparatoire n'ayant pas été communiqués ni au chef de chantier GO, ni au serrurier. Le retard dans la fabrication et la pose d'écrans-béton (solidarisés aux balcons) consécutif à des difficultés de mise en point des détails d'exécution a engagé le serrurier à ôter toutes les protections provisoires pour tenter vainement (chevilles inadéquates) de poser les garde-corps définitifs avant les écrans. Conséquence : aucune protection n'a été mise en place sur le premier bâtiment et presque aucune sur le second.

Conclusion de l'atelier : " La complexité et l'incertitude cohabitent sur le chantier. Il faut donc en organiser la gestion, c'est à dire le doter de moyens pour traiter les dysfonctionnements et les imprévus de telle sorte qu'ils ne portent pas atteinte aux intérêts des partenaires. Les textes réglementaires, qui prévoient des pénalités, et les contrats ne donnent aucun moyen efficace pour régler ces problèmes ".