ENTRETIEN AVEC ALAIN BIRAULT

Alain Birault est ingénieur dans le service Prescriptions Techniques chez Lafarge Plâtres. Il résume les enjeux liés à l’implication de sa société dans la filière sèche et retrace dans les grandes lignes les évolutions qui ont conduit la plaque de plâtre à participer au PCIS.

" Le PCIS s’inscrit dans une logique d’élargissement du domaine d’utilisation des produits et systèmes "

CHANTIERS 2000 : La société Lafarge Plâtres a contribué à la mise au point du PCIS. Vous soutenez aussi le développement de la filière sèche. Dans quelle stratégie s’inscrit ce soutien?

Alain BIRAULT : Nous proposons un système de construction, à base de plaques de plâtre, plutôt qu’un produit spécifique. Nous fabriquons à cet effet différents types de plaques standards dont les performances sont différentes suivant la combinaison adoptée. Nous élaborons par ailleurs des produits innovants à valeur technologique ajoutée. Ainsi, nous pensions que nos produits pourraient se développer s’ils s’inscrivaient dans une technologie satisfaisant à cette stratégie de système. Il fallait aussi que cet environnement technologique soit cohérent. La filière sèche correspondait à cette approche puisqu’elle procède par assemblage et pose sur chantier de produits industrialisés secs préparés en usine. Le PCIS, qui est une association de différents matériaux, illustre bien cette stratégie de système de construction que j’évoquais précédemment.

Les principaux objectifs que nous nous sommes assignés au travers de la filière sèche sont :

- l’élargissement du marché de la plaque de plâtre, en volume et en technicité;

- l’aide aux entreprises plaquistes pour développer leur domaine d’intervention, leurs qualifications et leur chiffre d’affaires par opération;

- le développement d’une politique de qualité sur le chantier.

C2000 : Vous aviez tout d’abord soutenu la filière bois.

A.B : Ce marché représentait une triple opportunité : améliorer de 30 à 40% le ratio de consommation de plaques de plâtre par mètre carré de surface habitable (création du plafond Prégymétal et substitution des refends béton par des refends secs avec plaques de plâtre); développer les ventes de plaques plus techniques; accroître significativement le chiffre d’affaires des entreprises plaquistes et améliorer les conditions de travail des ouvriers sur des chantiers totalement secs. C’est à cette occasion que nous avons eu l’idée d’utiliser une plaque de plâtre Prégyroc BA 13 qui participait au contreventement de l’ossature des panneaux de murs. Auparavant, le contreventement des ossatures bois était traditionnellement réalisé par des croix de Saint-André en bois. Suite à une campagne d’essais menée en 1986, le CTBA avait codifié la capacité des panneaux dérivés du bois à assurer cette fonction selon le type et l’espacement des fixations. Il avait aussi mis en avant la contribution apportée par les plaques de plâtre standards à la raideur des ouvrages. Cependant, cette contribution était trop faible pour être prise en compte dans les calculs de stabilité. L’optimisation du système était donc incomplète et pesait sur les coûts de revient. Nous avons alors conçu et réalisé un banc d’essais pour définir les principaux paramètres influant sur le comportement des plaques de plâtre en contreventement. Cette recherche s’est traduite par la mise au point d’un système composé d’une plaque de plâtre Prégyroc BA 13, résistante à l’eau et de très haute dureté, et d’une visserie spécifique.

C2000 : Votre société s’est ensuite repositionnée sur le filière acier.

Le soutien à la filière bois ne s’étant pas concrétisé par de nombreux projets, nous avons rejoint la filière acier avec l’intention d’exploiter les acquis de la filière bois. Outre la Prégyroc, nous avions en effet développé un plancher bois séparatif Prégybois, constitué d’un platelage composite (CTBH 22+ Prégyplac BA 18) vissé sur solivage bois, et d’un plafond Prégymétal avec Prégyplac BA 18, le plénum recevant un matelas de laine minérale. Un point important : ce nouveau plancher permettait de répondre aux exigences feu et aux contraintes acoustiques fixées par la réglementation. Il s’avérait par ailleurs être intéressant en terme économique. Lorsque nous nous sommes repositionnés sur la filière acier, nous avons pu mettre à profit cette expérience. Les problèmes sont en effet sensiblement les mêmes, tant en matière d’acoustique que de sécurité-incendie. Au tout début, nous avons d’ailleurs travaillé sur la base des DTU bois-feu, avec les bureaux de contrôle, pour la justification de stabilité au feu des ouvrages.

C2000 : Comment s’est traduite votre implication dans la filière acier?

A.B : La première étape a consisté à élaborer un plancher mixte collaborant destiné à se subsituer au plancher béton sur prédalle, alors utilisé en ossature acier. Ce fut le plancher Cofastra Décibel qui donna aux concepteurs, en fonction des contraintes et des portées, de charge, de protection au feu et d’isolation acoustique, le montage à prescrire à partir de produits de trois fabricants (Usinor-Sacilor, Saint-Gobain et Lafarge). La seconde étape, consécutive au protocole " Construire avec l’Industrie ", s’est traduite par la mise au point d’une première génération de plancher sec qui se subsituait au plancher Cofastra Décibel. Ce plancher distributif, expérimenté à Désertines (Voir interview de Robert Aiello), était composé d’un platelage en plaques de plâtre Prégychape posé sur bac métallique avec un plafond Prégymétal incorporant dans le plénum un matelas de laine de verre. Nous avons par la suite mené des travaux sur la Nouvelle Réglementation Acoustique qui ont abouti à une REX située à Montargis, sur des bâtiments à structure métallique, avec pour objectif d’optimiser les compositions des planchers, des cloisons séparatives et de doublages de façade. Cette réalisation a permis de confirmer les performances de cette technologie avec des isolements acoustiques compris entre 54 et 63 dB(A) et des niveaux de bruits de chocs compris entre 45 et 56 selon les parois et les montages.

C2000 : Le PCIS s’inscrit donc cette stratégie de continuité. Il n’a pas nécessité de développer des produits nouveaux.

A.B : Dans le cadre de cette innovation, nous sommes dans une logique d’élargissement du domaine d’utilisation des produits et des systèmes. C’est d’ailleurs le cas pour tous les industriels impliqués dans la conception du PCIS. A titre d’exemple, la Prégychape qui constitue le support du revêtement de sol est une évolution de la plaque Pégyroc, le système Prégychape lui-même ayant été développé comme chape légère pour la réhabilitation ou le neuf.

Un point-clé : l’expérience. Celle-ci a largement favorisé la réussite du partenariat entre les industriels, chacun étant déjà investi dans la filière sèche depuis longtemps. Un second élément de réussite : la continuité des équipes, et notamment celle du bureau de contrôle qui a eu un rôle déterminant dans la validation du cahier des charges produit par le groupe et qui a été le rapporteur de l’ATEx.