MANAGEMENT INTERCULTUREL

De ces différents témoignages il ressort que, malgré la spécificité des techniques employées sur cette opération, ce n'est pas au niveau technique que se situent les principales difficultés mais bien au niveau de la différence d'organisation sociale. Ils opposent la culture britannique, très formaliste, avec ses règles, ses spécifications générales détaillées.

"Leur esprit est de respecter la règle, alors que l'esprit latin est de la contourner. L'attitude des Britanniques représente à la fois des avantages et des inconvénients: suivre les règles a de bons côtés, mais sur un chantier comme celui-ci, dès qu'il y a un imprévu, les gens sont démunis car il n'y a pas de règles. Ils s'arrêtent et attendent l'ingénieur qui va fixer la règle. Du côté français, dès qu'il y a un imprévu, tout le monde se mobilise, même sans règle. Ce qu'on essaie de faire c'est de prendre les côtés positifs des deux côtés: le côté rigoureux anglais et l'esprit créatif français".

Un exemple d'approche culturelle très différente est fourni avec le système d'assurance qualité sur ce chantier: "C'est un système très conventionnel et très rigoureux. On a produit des tonnes de papier pour certifier que chacun a respecté les procédures. Mais si l'on note des anomalies, elles sont noyées dans la masse et personne ne les voit plus. C'est un système très complexe mais qui peut laisser passer des choses très graves. En France, le contrôle qualité est beaucoup moins développé qu'ici".

En matière de contrôle des coûts, le rôle traditionnel des quantity surveyors est transformé par le caractère forfaitaire du contrat: ils n'ont pas ici à surveiller les quantités, mais s'impliquent plus dans le suivi des budgets du chantier. Et surtout, leur rôle est de gérer les sous-traitants: ce sont les QS qui passent et suivent les contrats. Ils travaillent directement auprès des construction managers. La structure prévisionnelle des coûts est donnée en Tableau 3 :

Main-d'œuvre 20%
Matériau 15%
Matériel 15%
Consommables 10%
Encadrement (y compris frais généraux) 10%
Sous-traitants 30%.

Tableau 3

D'après le contrôleur de gestion (Français), la partie analytique des coûts est faite de la même manière en France et en Grande-Bretagne, mais la différence tient au fait que les Britanniques, entreprises ou QS, n'ont pas l'habitude de gérer eux-mêmes directement la trésorerie.

Les coûts qui ont le plus dérivé sont les coûts de la main-d'œuvre (temps passé) et du matériel. Les paiements se font sur travaux faits et un certain nombre d'échéances, de milestones ont été arrêtés au départ. L'avancement des travaux est contrôlé par SEEE et Halcrow, et Gifford & Partners doit donner son accord pour les paiements. Il vérifie aussi que le contrôle de SEEE et Halcrow a été fait dans les normes et qu'il a reçu à cet égard les certificats (de Maunsell & Partners).

Quant à l'organisation en joint-venture, elle ne pose pas de problèmes spécifiques, en-dehors des problèmes de différences culturelles. "Les problèmes que l'on rencontre sur des chantiers comme celui-ci ne tiennent pas à l'aspect joint venture mais sont beaucoup plus inhérents à la structure grands projets".